1. Préambule
Les défis : en ce début du XXIème siècle, un effondrement de notre civilisation thermo-industrielle est dans le domaine du possible : inaction face à la menace climatique, autodestruction par épuisement des ressources et de la biodiversité, menaces sur les grands biens communs de l'humanité (l'eau, l'air, les terres, les mers ...), conflits guerriers incontrôlés, catastrophe nucléaire, …etc. La montée des inégalités (territoriales, sociales et économiques), stigmatisations et discriminations, crise du vivre ensemble... nous assistons un peu partout dans le monde à une accélération inquiétante de replis identitaires et de logiques autoritaires, au développement d’idéologies mortifères, allant de l’idolâtrie financière à la xénophobie et à l’intégrisme religieux. Une nouvelle crise financière, encore plus dévastatrice que celle de 2008, menace. Nous devons dès à présent faire face à cinq crises majeures : crise économique, crise sociale, crise politique, crise environnementale, mais aussi crise du sens et de la reconnaissance, auxquelles la compétition et le productivisme marchand ne peuvent répondre.
Les réponses actuelles : les gouvernements se montrent trop souvent impuissants ou complices face à ces dysfonctionnements inacceptables, entraînant un tout petit nombre vers l’accumulation des biens matériels et des pouvoirs, alors qu’il faudrait valoriser la sobriété des comportements et le partage équitable des ressources. Ces enjeux vitaux auxquels l'humanité est désormais confrontée rendent dérisoire l'approche dominante du Politique qui se réduit pour l'essentiel a une compétition électorale. Il n'est plus acceptable, tant les enjeux sont lourds, de réduire la démocratie à des compétitions électorales intermittentes et emprisonnées dans une logique de court terme et d'affrontement simplificateur. Dans les cas les plus graves cette forme peut même, comme on le voit au Brésil, aux États Unis, en Inde et dans plusieurs pays européens, faciliter l'élection de personnes surfant sur les peurs et proposant des politiques tournant le dos à la responsabilité écologique, la justice sociale et l'approfondissement des droits humains.
La nécessité démocratique : les autres fonctions du Politique, (la construction des conditions du vivre ensemble en Paix et la préparation de l'avenir) doivent être revalorisées et la nature du «Temps électoral» modifié en conséquence. Il faut un imaginaire démocratique capable de construire un Récit en acte autour de politiques de résilience des territoires face aux crises, bouleversements, voire effondrements majeurs susceptibles de se produire (et qui ont déjà commencé) au cours de la prochaine décennie. Les périodes électorales doivent être des périodes à haut niveau de participation, permettant la délibération et la construction de stratégies collectives en réponse aux défis actuels sans se réduire à la forme actuelle, purement délégative et très peu représentative, réduite à la compétition narcissique de leaders sans pouvoir de création au service d'un bien commun. C'est pourquoi nous avons besoin d'une mutation profonde de nos démocraties car la forme actuelle principalement compétitive, électorale et quantitative ne permet pas d'affronter les défis écologiques et sociaux considérables auxquels sont confrontés nos sociétés.
En cette période d’urgences et de défis majeurs, il est impératif que les organisations et les personnalités se reconnaissant dans l’écologie et les solidarités, au-delà des appels au rassemblement, adoptent une méthode leur permettant d’œuvrer ensemble. En proposer une est l’objectif de l’Archipel de l'écologie et des solidarités.
2. Valeurs et principes communs
Pour fonder l’Archipel de l ‘écologie et des solidarités, il est essentiel que les organisations qui sont déjà impliquées dans ce processus, ou qui souhaitent le rejoindre, se rassemblent autour d’un socle de principes et de valeurs communes. Ce socle est une référence collective à promouvoir ensemble. Il sera complété par les grandes lignes de la gouvernance envisagée pour cet Archipel. La vision politique se doit d’être précise quant aux objectifs et orientations générales, mais suffisamment large sur les chemins pour y parvenir, afin de rassembler les acteurs des principales organisations de transformation sociale, écologique et démocratique.
Nos valeurs communes : toutes organisations politiques (partis, mouvements, coopératives), et non politiques (associations, ONG, syndicats, ...), qui, jour après jour, résistent à la destruction de notre écosystème, à la montée des inégalités, à l’affaiblissement de notre démocratie et qui œuvrent à la constitution d’une société fondée sur la coopération, la solidarité et la perspective du bien vivre, sont animées par des valeurs communes : Sobriété, Justice, Solidarité, Émancipation, Créativité.
Elles peuvent se décliner en partage et équité, responsabilité et coopération, solidarité et dignité, respect et diversité, résistance et expérimentations, lucidité et sobriété, justice et paix, créativité et volonté. Ces valeurs sont portées par des projets qui permettent de rappeler ce qui nous rassemble et qui est déterminant pour notre avenir. Elles permettent de redonner du sens et du contenu à la devise de la République française : Liberté, Égalité, Fraternité. Elles exigent de résister aux dérives d’un système insoutenable et inégalitaire, d’imaginer des sociétés justes et solidaires et d’expérimenter de nouvelles activités et des pratiques innovantes qui préfigurent le vivre ensemble, le bien vivre de demain.
Nos cinq grands principes :
- Le principe de commune naturalité : nous, humains, ne sommes pas extérieurs à la nature, nous en faisons partie. Humains, espèces vivantes et environnement, nous sommes tous en interdépendance. Nous avons donc la responsabilité de prendre soin de la nature dans son ensemble. C’est un principe d’écologie.
- Le principe de commune humanité : interdit toutes les formes d’exclusion et de stigmatisation fondées sur les différences de couleur de peau, de nationalité, de religion ou de richesse, de sexe ou d’orientation sexuelle. C’est un principe d’égalité.
- Le principe de commune socialité : considère tous les êtres humains comme des êtres sociaux pour qui la plus grande richesse est celle des rapports qu’ils établissent entre eux. C’est un principe de fraternité.
- Le principe de légitime individuation, ou encore d’accomplissement personnel : permet à chacun d’affirmer au mieux son individualité singulière, en développant sa puissance d’être et d’agir sans nuire à celle des autres. C’est un principe de liberté.
- Le principe d’opposition maîtrisée et constructive affirme que l’objectif politique premier est de permettre aux êtres humains de vivre ensemble, de coopérer mais aussi d'être en désaccord et de se donner sans se sacrifier. C’est un principe républicain.
Tous les totalitarismes, les dictatures et les oligarchies, y compris celles de la finance, se sont opposés et s’opposent encore à ces cinq grands principes. Nous voulons contribuer à la construction d’une société qui ne soit pas aliénée à la croissance matérielle. L’émancipation individuelle et collective ne peut et ne doit plus reposer sur la démesure du PIB, de la richesse et du pouvoir, mais sur d’autres sources d’inspiration : engagement au service du bien commun, respect de la dignité de la personne, émancipation des femmes et de tous les êtres humains discriminés, volonté de coopération, sobriété volontaire, respect de la nature. Nous voulons passer du pouvoir de domination au pouvoir de création.
Ces principes se déclinent dans cette charte en huit résolutions pour construire ensemble une société alternative qui soit fondée sur :
- La rupture avec le modèle productiviste et extractiviste par une régulation de la finance et une redistribution sociale
- La décroissance sélective et une décarbonation de l'économie en rupture avec le consumérisme, en faveur de la convivialité et du bien vivre
- L'appropriation collective des biens communs
- La promotion de l'économie du partage et de l'usage
- La protection du Vivant et des équilibres naturels
- La réduction du temps de travail et la valorisation du temps libre
- La transition énergétique et un bouclier de services dans les territoires
- La mise en œuvre d'une République démocratique et décentralisée
La mutation vers une société du bien vivre est au cœur du projet de l’Archipel de l'écologie et des solidarités. Cette Grande Transition écologique, sociale et démocratique doit intégrer aussi des perspectives de résilience face à des risques réels d'effondrements. Sans avoir recours au militantisme sacrificiel, cette transformation sociale suppose également une transformation personnelle dans nos pratiques militantes.
Conclusion
Nous sommes aujourd’hui nombreux mais dispersés. Tisser des liens au sein des organisations politiques et des organisations de transformation écologique et sociale est aujourd’hui impératif. C’est dans les connexions entre ces organisations que résident notre principale source d’espoir. Même s’il le désirait sincèrement, aucun gouvernement élu dans le monde ne disposerait aujourd’hui du pouvoir d’appliquer scrupuleusement les valeurs que nous défendons. Il se heurterait à l’oligarchie des détenteurs actuels des pouvoirs politiques, administratifs et économiques. Le changement doit donc être porté par un très fort soulèvement citoyen, relayé et accompagné par les organisations politiques, aux échelles mondiales et nationales, comme au niveau des territoires.
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